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Société & Vie urbaine à Porto-Novo

Des fêtes qui assourdissent et appauvrissent

Des fêtes qui assourdissent et appauvrissent

À Porto-Novo, chaque week-end rime avec effusion sonore et dépenses ostentatoires. Mariages, baptêmes ou funérailles deviennent des scènes d’exagération sans limite, malgré les lois et les alternatives proposées. Le silence complice des autorités locales nourrit l’impunité, pendant que les populations, elles, subissent et s’appauvrissent.

Quand le folklore vire au vacarme

À Porto-Novo et ses environs, les cérémonies familiales ont pris une tournure inquiétante. Chaque fin de semaine, les quartiers vibrent au rythme de festivités qui s'étendent jusque tard dans la nuit. Les funérailles, mariages, baptêmes ou communions sont devenus des compétitions de prestige. Tentes, chaises, décorations tapageuses, sonorisation à fond et tam-tams enragés transforment les rues en scènes d'exhibition sonore. Les lois encadrant le bruit public sont allègrement violées, sans réaction notable des autorités locales.

Une tradition vidée de son sens

Autrefois, ces cérémonies marquaient de simples moments de partage. Aujourd’hui, elles sont devenues des démonstrations coûteuses où l’on rivalise de faste. Les deuils, en particulier, donnent lieu à des dépenses extravagantes : corbillards luxueux, cercueils hors de prix, tenues traditionnelles sur mesure pour plusieurs jours de festivités, sans oublier les prestations d’artistes folkloriques. Certains n’hésitent pas à vendre des biens ou s’endetter à des taux usuraires pour financer ces instants de paraître, espérant compenser avec les dons reçus espoir souvent déçu.

Une loi oubliée, un décret ignoré

Face à ces abus, des tentatives ont vu le jour. En 2017, le député Nazaire Sado avait déposé une proposition de loi pour encadrer ces cérémonies jugées socialement nocives. Il dénonçait les excès liés à la volonté de « laisser son nom dans l’histoire » par des dépenses parfois délirantes. Mais cette initiative est restée lettre morte. L’État a cependant pris un décret en juin 2024 (n°2024-991) pour réglementer les services funéraires fixant notamment la durée de conservation des corps sans toucher au cœur du problème : le tapage public et les coûts sociaux.

L’exemple ignoré des salles insonorisées

Pourtant, des solutions existent. Des opérateurs économiques ont investi dans des salles de fête modernes, insonorisées et mieux adaptées à ce type de manifestations. Mais dans l’indifférence générale, les rues de Porto-Novo continuent d’être barricadées au nom de la tradition, souvent avec la bénédiction passive des autorités locales. Certains événements durent plusieurs jours, perturbant durablement la tranquillité publique.

Une société à deux vitesses

Pendant que des voix s’élèvent pour appeler à la raison, une partie de la population s’enfonce dans une logique de dépense excessive, sous le regard impassible de ceux censés réguler l’espace public. En sacrifiant le confort des uns au prestige des autres, la ville creuse un fossé entre ce qui relève du culte de la tradition et le besoin vital de quiétude et d’équilibre social.

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